« Le jeu de l’a et de l’Autre »    

Echo de la  soirée du groupe Epitomé le 9 juin

La dernière soirée d’Epitomé annoncée sous le titre « Le jeu de l’a et de l’Autre » nous réservait une belle surprise. Amélia Barbui, membre de la Scuola Lacaniana di Psicoanalisi avait fait le voyage depuis Milan pour travailler avec Epitomé. Son texte paru dans Scilicet* Logique, consistance et remis à chaque participant trouvait une dimension inédite dans la lecture que nous en fit Maurice Hébert, comédien. Le poids de cette énonciation singulière a donné une tournure exceptionnelle et très vivante à cette soirée. Cette voix prêtée au texte laissait entendre une autre consistance que celle d’une simple lecture de ce texte écrit sous forme d’un dialogue entre deux protagonistes « piccolo a » et grand A. Cette introduction, cette mise en jeu, invitait chacun à prendre la parole, questions, réflexions se formulaient à voix haute et témoignaient de notre recherche, de nos tâtonnements, d’un savoir pragmatique en mouvement où peut-être la logique s’assouplit. Petit a est un élément complètement hétérogène à l’Autre, ni élément signifiant, ni reste de l’opération signifiante, il est un « trou », un trou qui n’est pas un manque. Ces différentes formulations pour saisir a sont bien sûr représentatives du parcours que nous faisons dans l’enseignement de Jacques Lacan, du premier au tout dernier enseignement.

Petit a dit « on pourrait se rencontrer sur la courbe de Gauss, c’est une demande d’amour » comment entendre cette demande d’amour de deux éléments aussi hétérogènes ? Cette rencontre ne nous conduirait-elle à une autre satisfaction ?

A petit a, les vérités multiples, l’imprévisibilité, l’indétermination, mais pas sans un certain « ordre », « sous le chaos apparent il y a un ordre, il y a une consistance logique à tout cela. Laisse-moi vibrer !» dit petit a. Si petit a est un « bout de réel », une « pars fracta », irrémédiablement séparée, elle n’en est pas moins opérante et consistante, en rapport avec le plus vivant. C’est d’ailleurs bien avec cet enjeu que s’est tenu notre journée à Grenoble le 31 mai, Elisabeth Leclerc Razavet proposait en introduction de « faire de la jouissance une fonction » et mettait en lumière le commentaire de Jacques-Alain Miller à propos du Séminaire D’un Autre à l’autre  « …l’effort de Lacan dans ce séminaire est de faire de la jouissance une fonction et de donner sa structure logique à cette fonction »

A grand A l’unicité, la cohérence, les principes aristotéliciens du tiers exclu et de la non- contradiction. « Arrête d’essayer de me comprendre, de m’habiller de signifiants…Ecoute l’écho de la jouissance ; tu verras comment elle s’habille, se colore, s’embellit »

Si l’ordre de A est homogène à un ordre social universel, l’ordre de a s’invente. « Guidé par ma main autour du trou se tisse avec ton fil une fragile dentelle » Ainsi causée par le a, se tisse, pas sans l’Autre, une modalité inédite, ouvrant à un lien social qui inclut l’inconscient. Ces réflexions nous conduisaient penser la clinique en termes de pragmatisme, ou finalement le cas objecte toujours à s’inclure dans l’Autre mais participe plutôt par sa singularité à la construction d’un savoir nouveau.

 

*L’objet a dans l’expérience analytique (Textes préparatoires au Congrès de l’Association Mondiale de Psychanalyse d’Avril 2008 à Buenos-Aires)

 

Anne-Marie Meiser le 15 juin 2008